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Vogue la galère...


Invité JLChauvin

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Invité JLChauvin

A la demande quasi-générale de deux éminents membres du forum ( :Smiley_04: ) je remets mon histoire de train maudit, en espérant échapper cette fois-ci à toute provocation polémiste. Sinon le résultat sera le même que la première fois, et à titre définitif sur ce forum. :biggrin:

Donc voilà:

Journée V267 le 4 juillet [1] 99, une tournée LILLE prévue pour finir vers 20 heures et comprenant le casse-croûte à l'arrivée aimablement préparé, entre autres, par l'équipe ADC/ACT arrivée à 13 heures. Nous étions bien attendus et l'intendance ne posait donc aucun problème. Le train : 9880/9881 avec la tête finissant à LILLE et le reste rebroussant à LILLE en direction de BRUXELLES. A l'époque j'étais encore remplaçant au 100, mais comme çà faisait déjà plus de 4 ans que j'étais autorisé, une tournée comme celle là frisait déjà la routine.

A l'embauche, je croise un des mes anciens stagiaires: c'est toi qui fait le 9880, je monte devant jusqu'à ANGOULÊME! Bon, c'est déjà çà, j'aurais de la compagnie au moins jusque là. Préparation, sortie mise à quai, discute que je discute,... jusque là tout va bien la vie est belle!

Pourquoi on part pas? Le carré est toujours fermé, et on viens déjà de prendre 5 minutes ! Je décroche la radio [2]: allô PRS, c'est le 9880, je viens au nouvelles, qu'est ce qui ce passe? Oui bon, ben y a un bagage suspect, la SUGE [surveillance Générale] et les flics sont sur le coup... Au bout d'un long moment: le carré s'ouvre et DING-DING... allez vamos, c'est parti pour un tour, roulez bolide...

[1] le 4 juillet, c'est la fête nationale des USA, et vous allez voir que pour nous aussi çà été la fête!
[2] les procédures radio étaient encore réservées à la LGV NORD


Donc nous voilà partis en retard de Bordeaux, rames 525 en tête et 4516 en queue. Il fait soleil, tout les Blocs Moteurs sont là et la voie est libre.

Sortie de Bordeaux, mise en vitesse, les tunnels, LA GORP et le début de la zone 180, LA GRAVE D'A.... tout dans le coin pour le petit morceau à 220 qu'on pourra peut être atteindre si les rames sont vaillantes! Juste, juste, un petit 215 et déjà la zone à 200, le tableau P, le viaduc des 100 arches et l'arrêt de LIBOURNE.

C'est bon, on a déjà gratté un peu de temps et on va attaquer la longue zone à 220. Allez, pas d'hésitation, à fond les manettes! Traversée de COUTRAS, on frise le 220, et là sur les aiguilles de sortie côté nord, un pauvre petit chien de chasse planté au milieu de ma voie... qui ne se sort malheureusement pas! Petit choc, pas d'autres bruits, rien ne s'allume... paix à son âme et la vie continue (enfin la notre... icon_sad.gif ) tout est bon, la conversation en cours au moment de l'incident reprends et direction Le Grand Nord. Les zones de CHAVENAT, le maintenant fameux tunnel de CHARMANT, MOUTHIERS, une petite pointe à 190 et l'arrêt d'Angoulême avec presque plus rien de retard...


Une fois arrêté, j'ai décidé de vérifier pourquoi cette petite lampe rouge clignote comme çà dans ce qui me sert de cerveau. Je descends donc voir s'il reste des traces de ma malencontreuse rencontre avec ce si petit chien... et là, !§#^$¤£*%ù' (rontedjeuhhh) de !§#^$¤£*%ù' (rontedjeuhhh), la gueule de la bavure !

Le côté droit de la jupe est déglingué mais tiens encore sacrément bien et vous allez voir que çà a une certaine importance pour la suite, mais surtout la tôle inférieure en couvrant la base est entrebâillée avec une partie repliée vers le bas! Bien sur, à l'époque les rames n'était pas encore toutes équipées d'attaches rapides pour faciliter le démontage de cette partie! Et la tôle pliée venait presque flirter contre le crocodile du signal de sortie !

Rappelez vous du collègue, celui qui avait dû me supporter comme moniteur, il devait repartir presque aussitôt dans l'autre sens et ne me servait donc pas à grand chose... à part se marrer en me disant que j'étais dedans jusqu'au cou! Le voilà donc parti vaquer à ses occupations en me laissant seul face "au destin".

Bon, ben voilà, je remonte en cabine pour avertir ANGOULEME du désastre... grand silence, puis devant mon grand pessimisme, l'aiguilleur fini par me demander: "bon ben je referme, alors?". "Et oui, tu peux refermer..." Maintenant j'annonce la couleur au chef de bord (on sera pas à table à l'heure, alors ?), j'enfonce l'urgence, je prends mes gants, j'ouvre le caisse à outils et je descends sur la voie pour voir comment je vais me sortir de cette misère!

Me voilà donc en train d'attaquer le démontage de la jupe et de le tôle avec ma pince multiprise, parce que comme de bien entendu elle ne tiens plus que par le morceau le plus solide impossible à arracher à la main et que la tôle est faite en métal "ÉLASTIQUE A MÉMOIRE DE FORME" qui une fois plié ne reviens jamais en position initiale!

Le chef de bord (malheureusement décédé depuis icon_sad.gif ) viens très gentiment me proposer un coup de main, ainsi que le chef de service, mais avec ma seule multiprise comme outil, ils ne pouvaient pas grand chose pour moi. Bien sûr il y a le tas de casse-c. cas sociaux/râleurs habituel, dont un en particulier qui a aussitôt fait demi-tour sans demander son reste quand je lui ai proposé de m'aider pour aller plus vite! icon_lol.gif . Je ne sais pas si vous avez déjà démonté un truc pourrave devant un tas de badauds, mais c'est légèrement énervant, pour ne pas dire plus!

Au bout d'un moment je comprends que je n'arriverais à rien avec le peu d'outillage à ma disposition, aussi je demande au chef de service s'il n'y aurait pas de meilleurs outils dans la gare. Après un long moment, il reviens dépité: il y a bien l'atelier "VB" mais, rappelez vous que nous sommes un dimanche, personne n'a la clé!!! Je me suis déjà foutu minable avec de la graisse/crasse/m***e pour un résultat quasi-nul et çà commence vraiment à me courir sérieusement sur le haricot, cette histoire! Je décide alors d'employer les grands moyens, puisque je n'avais que dalle pour démonter ce truc, il restait... les pompiers et leur matériel de désincarcération! Le chef de service retourne donc appeler les pompiers...

Ils arrivent quelques minutes plus tard avec tout ce qu'il faut pour régler son compte à cette jupe récalcitrante: clés à cliquet, barre à mine, vérins... Coupe, démonte, arrache, plie... bref l'efficacité à l'état pur. Bon, je vérifie que les balises de CAB sont encore là, je fait un petit TEST CAB et miracle: çà marche! Ouf, enfin! Le chef des pompiers semble très inquiet que je puisse rouler plein pot avec un morceau en moins, je le rassure plus ou moins en lui expliquant que çà m'était déjà arrivé sans causer de problèmes.

Allez, c'est bon, on rembarque tout le monde, le carré s'ouvre, DING-DING, et c'est reparti pour un tour. On a pris 51 minutes dans les dents, je suis sale comme un vieux peigne et quand même un peu légèrement agacé fouet7.gif . Et puis avec tout çà, on ne vas pas bouffer à l'heure! Heureusement que les collègues, la bas a LILLE, ont décidé des faire la cuisine plutôt que d'aller au restau, parce que vu mon état de crasse...



Allez, hop, c'est pas le moment de rigoler. La situation est grave mais pas désespérée, comme dirait l'autre. Va falloir pousser le feu loulou, charge la mule, fais fondre la pelle et roule au timbre! On est pas là pour glander, j'ai déjà gratté un peu du retard, il faut jouer fin: flirt avec KGB* sans même le faire sonner, au trait tout du long et arrivée métro à POITIERS. Finalement, çà commence à aller mieux, les choses sont redevenues à peu prés normales.

Durant l'arrêt de POITIERS, je descends voir de prés si notre réparation énergique tiens le coup. J'inspecte tout çà dans tout les coins et ne trouve rien à redire. De toutes façons, si le CAB à morflé, je vais m'en rendre compte de suite, à l'entrée de la LGV. Bon d'un autre côté, n'anticipons pas, çà ne vaut pas la peine de s'inquiéter à l'avance, il me faut moral garder. Le ciel est couvert, j'espère bien ne pas trouver de pluie, avec mes capteurs de CAB à l'air...

Les TGV numéro 9880 à destination de LILLE EUROPE et 9881 à destination de BRUXELLES MIDI vont partir, attention à la fermeture automatique des portes, attention au départ. Coup de sifflet, les portes se ferment, DING-DING. Allez, roule ma poule, je vais tacher de faire le maximum! Lors de la mise en vitesse, le chef de bord m'appelle par l'interphone: "Çà se passe bien devant? "J'ai vu que tu avais bien regagné à l'arrêt de POITIERS, continue comme çà, et peut être que l'on ne mangeras pas trop tard. Au fait, tu es au courant qu'on passe par JUVISY?"


* KGB, doux surnom donné au KVB, contrôle de vitesse par balises. Devinez pourquoi. (oui à la SNCF le symbole de contrôle c'est K, cherchez pas, ... chercher à comprendre c'est commencer à désobéir!)


Allons bon, on passe par JUVISY! Ça ne vas pas arranger nos affaires, çà! Bien sur, tout le monde le sait sauf moi! Remarquez que je m'en doutais un peu, étant donné que la veille un patachon à roulé à côté des rails (!) sur presque toute la longueur du pont de VALENTON, au dessus de VILLENEUVE... alors, forcément! Le chef de bord me dis que l'on passera quand même par la LGV pour desservir MASSY, c'est déjà çà de pris.

Avec tout çà, le ciel deviens de plus en plus menaçant! Allez, on respire un grand coup et on oubli les futures sources d'ennui. Vent debout, les gares défilent, CHÂTELLERAULT est avalé à 200 et je mets le turbo pour la grande zone à 220. Tout va bien, les rames pètent le feu et je finis par trouver tout çà amusant, finalement çà change de la routine! Le 210 de PORT DE PILES, le 210 de SAINTE MAURE*, la BIF. de MONTS, le 160, le 100 et nouvel arrêt métro à SAINT PIERRE.

Je retourne voir mon bricolage, çà tiens le coup, on doit pouvoir s'en sortir comme çà. Re-annonce, re-sifflet, re-portes, re-DING-DING. J'ai quand même rattrapé pas mal de retard, mais évidemment si on passe par JUVISY... En plus, voilà qu'il commence à tomber quelques goutes!

Allez, c'est là que l'on va savoir si le CAB marche toujours. Démarrage plein pot, les Indicateurs de Direction à Distance et leur "½ Y" à gauche, au moins je suis bien dirigé vers la LGV. Le carré du Poste 1 avec 1 feu à l'Indicateur de Direction, le "Baissez-Panto", le sectionnement, je remonte le panto et me prépare physiologiquement au pire avec le CAB.

Mince, çà marche: 160E puis 270MN pour le tunnel et enfin 300MN. Ouf c'est déjà çà de pris! Par contre le ciel commence à s'ouvrir pour de bon, et je n'aime pas trop l'idée de grosses entrées d'eau sur mes capteurs CAB sans protection...



Et maintenant, c'est carrément des trombes d'eau que je traverse à tout berzingue! Ça ne s'arrange pas vraiment côté ciel, mais pour l'instant j'ai toujours du 320 au visu... pourvu que çà dure!

"9880, ici le PAR". Allons bon, je n'aime pas quand le PAR s'intéresse directement à mon cas comme çà... "Oui le PAR, le 9880, je t'écoute". "Je ne sais pas si tu es au courant..." j'adore quand çà commence comme çà! "...tu vas passer par la voie MG, JUVISY et rattraper VALENTON par le SUD-EST..." à bon, c'est tout? "...un train à déraillé hier sur le pont et a emporté la voie, tu connais par là?".

Étant encore remplaçant, je connais effectivement AUSTER... La Palombe[1] et le Bégon[2] n'ont plus aucun secrets pour moi! Je suis aussi passé plusieurs fois par les EV et LA FAISANDERIE, entre autre avec des Z2 que l'on emmenait encore en reprofilage AUX ARDOINNES, à mes débuts d'autorisé à 160. Par contre de JUVISY à VALENTON par le SUD-EST, je ne suis jamais, mais alors ce qui s'appelle jamais passé!

Je luis réponds donc que jusqu'à JUVISY çà le fait, mais qu'il va falloir organiser la suite. Il m'assure que tout est prévu et que j'aurais une fiche de détournement pour la partie que je ne connais pas. Bon, on y crois, je verrais bien sur place. Pendant ce temps, les kilomètres défilent très rapidement, le CAB tiens le coup et la pluie finit même par se calmer. Je finis par arriver sans encombre à MASSY ou je vais vérifier si je n'ai rien perdu: ras, rien n'a bougé. Ça ne se passe pas si mal que çà, au bout du compte il doit me rester 35/40 de retard, et si le pont n'avais pas été démoli on aurait mis les pieds sous la table presque à l'heure. Je vérifie les vitesses sur les RT, et nous voilà reparti pour faire un peu de tourisme.

Une fois sur la Grande Ceinture, j'appelle le Régu pour qu'il me confirme que je vais bien à JUVISY. "Pas de problèmes, tu prends la voie MG à ORLY". Allez, çà baigne, le ralent 60 à PONT DE RUNGIS et le rappel à ORLY. Et là, en amorçant la courbe sur la voie MG: RONTUDJUUUU, un bras de rappel qui pends du support!!!!! P****n de p****n! Je baisse les pantos, je tape l'urgence... BONKKK sur la toiture et me voilà arrêté! ORLY m'appele à la radio pour me demander ce qu'il m'arrive et je lui réponds sobrement: on est dans la merde!



...çà pour l'être, on l'est!
Bon, pas de panique, chaque chose en son temps. Les portes sont bloquées, un petit coup d'œil par la fenêtre pour m'assurer que la caténaire n'est pas tombée, ensuite un coup d'APPEL REGU à la radio. "Régulateur, j'écoute" et je lui annonce la bonne nouvelle "c'est encore le 9880, je suis arrêté sur la voie MG en face d'ORLY suite à une avarie caténaire et j'ai entendu un grand choc en toiture, la caténaire ne semble pas être tombée". Le Régu "…" je continue donc "Je pars à la visite et je te tiens au courant". Le Régu me réponds, il m'explique qu'il vient d'y avoir un gros orage et que c'est ce qui a du causer l'incident.

La ceinture et je descends. Je vois tout de suite où se situe le principal problème: le bras de rappel est par terre, et surtout même si le fil de contact n'est pas cassé, le porteur auxiliaire est coupé, quand au panto, impossible de voir s'il a morflé ou pas depuis en bas... c'est pas bon du tout, çà! Retour à la cabine, j'explique la situation au Régu et je commence à sortir les demandes de secours. Dés que je lâche ce mot maudit, il me dit: "Je ne la prends pas de suite, le plus urgent est de savoir de combien tu engage les aiguilles, tu nous bloque la ligne C!!!!" Oui mais bon, quand même... "non je te dis, les banlieues sont en train de s'empiler derrière, déjà que t'étais en retard." OK, si tu le veux comme çà, je vais voir et je rappelle par un téléphone de signal.

Après avoir averti le chef de bord et immobilisé les rames me voilà donc parti dans les cailloux. En effet, je suis arrêté sur le diagonal voie 2 / voie MG, mais l'aiguille sur la voie 2 est largement dégagée. Donc j'appelle le Poste R pour lui présenter la situation, et il semble que ne soyons pas exactement compris (c'est important pour la suite). Le Poste R me demande de faire une "annulation de transit" pour pouvoir remettre l'aiguille de la voie 2 en bonne position pour laisser passer la banlieue.

Me voilà donc comme un gland parti chercher ces p*****s de boîtiers... Cherche que je te cherche dans tous les coins, je ne les trouvent pas, et l'orage qui se remet à gronder! J'adore çà, moi, faire le con sur les voies pendant l'orage!!!!! Je rappelle le Poste R, qui essaie de m'aider à localiser ces machins, mais rien. Je vous passe les divers aller-retour dans le coin de cette aiguille... enfin sauvés, je fini par trouver cette foutue petite boite. On fait la manip avec l'aiguilleur et me revoilà parti vers mes rames... et je me prépare au pire, depuis le temps que je suis arrêté sans jus, les batteries on du en prendre une sacré claque...



Me voilà revenu sur la motrice arrière et là, miracle des miracles, les batteries ont bien tenu le coup! Je ne vais quand même pas tenter le diable, j'appelle le chef de bord pour lui résumer la situation et l'avertir que je vais couper les batteries, je l'ai senti...résigné! Je coupe donc le jus et en passant à côté d'un téléphone de signal, je préviens l'aiguilleur du poste R que je n'aurais plus de signalisation d'arrière. Je finis de remonter la rame et je remonte dans la cabine pour enfin, établir la demande de secours.

Le régu m'explique que les diesels sont déjà sur les starting-block à MONTPARNASSE et donc de tout préparer pour leur arrivée. Qu'à cela me tiennes, me voilà parti à attaquer la mise en véhicules (4 motrices à isoler) à la lumière de la lanterne et dans une chaleur moite et en finissant de me mettre minable (rappelez vous le chien...). Je finis la première, je descends, la deuxième je redescends, la troisième je re-redescends et là je tombe nez à nez avec l'équipe d'astreinte caténaire. Le chef me dit: "Bon, on à jeté un œil depuis en bas, tu pourrais pas essayer de remonter les pantos?"

Oui je veux bien essayer, à ses risques et périls, et surtout en isolant le panto qui a tapé. Mais bon, comme je m'étais déjà entendu avec le régu, j'explique à l'astreinte que nous sommes prés de la cabine de queue et que je préfère demander l'avis du régu... Régu qui me dit: "OK, on essaye!" je m'exclame "T'es sûr, il faut que je remettes au moins deux motrices en service, çà va prendre du temps." et le régu de me répondre: "Si, si, on fait comme çà!". Et merde, je repars donc dans l'autre sens et je me fais encore une fois chier suer (pour de vrai, dans la moiteur des compartiments moteurs) pour remettre tout en place, sauf la première motrice à cause du panto avarié.

Ouf, je suis bien content d'avoir fini, et là, tout fier, j'appelle le régu pour lui dire que je suis prêt. Et là, les bras m'en tombent: "Non, finalement on prends pas le risque, les diesels sont prêts à partir, tu mets tout en véhicule!" Arghhhhh, quelle bande d'(cesuré)...



Je recommence donc à mettre les motrices en véhicules, une fois de plus! Arrivé sur la dernière, je me dis que, parti comme s'est parti, je ferais mieux de me préparer à sortir l'attelage de secours, au cas où... Donc, me voilà planté côté MASSY à attendre les diesels de secours. Entre temps les ACT avait pris l'initiative de débloquer quelques portes pour laisser rentrer un peu d'air dans les rames sans clim, il n'y avait pas des risques puisque la voie MG est isolée des autres à cet endroit là.

Au bout d'un long, mais alors très long moment, se pointent les 2 engins... sur la voie MG venant de PONT DE RUNGIS!!!!!!! Rappelez vous que l'aiguilleur et moi ne nous étions pas bien compris: je dégage bien la voie 2, mais je suis arrêté sur l'aiguille voie de liaison-voie MG!!!!! Ça va pas le faire, de s'accrocher comme çà... Allez, demi-tour des locos, et retour par la bonne voie pour enfin faire l'attelage (engins équipés de l'attelage auto). Le secours est amené par le conducteur et un CTT, après concertation nous voilà partis à atteler. CLACK, çà marche! Problème, il y a une fuite CG, impossible de desserrer! Mais bon sang mais c'est bien sur, j'ai laissé l'urgence enfoncée de l'autre côté... c'est ballot!

Du coup le CTT viens avec moi côté JUVISY, je remontes l'urgence et allez savoir pourquoi, la chaleur sans doutes, nous redescendons. Nous entendons la CG se remplir, la rame avance de quelques centimètres et s'arrête. Nous remontons et là l'horreur... CG ET CP à 0, CF serrés au maximum! Il appelle le conducteur des 67200 sur son portable, qui lui annonce la bonne nouvelle: l'attelage s'est décroché... Ah ben tiens, de mieux en mieux!



Le CTT décide de retourner voir ce qui se passe, je lui propose de rester côté JUVISY et de me rappeler au portable s'il à besoin de moi. Vu comme c'est parti, il vaut surement mieux que je me tiennes éloigné de tout ce qui est mécanique. Au bout d'un long moment, comme mon téléphone n'a toujours pas sonné, je lui passe un coup de fil pour lui demander comment çà se passe. "On est en train de finir de réparer l'attelage du 67000, avec l'équipe des caténaires"... avec qui? Bon laisse tomber Jean-Louis, chercher à comprendre c'est commencer à désobéir....

Ça y est c'est attelé, on va faire les freins et pendant ce temps là, les ACT refermeront les portes qu'ils ont débloquées... çà gagnera du temps. Le but du jeu maintenant va consister à refouler derrière le carré de la voie MG pour repartir vers MASSY ou un transbordement serait prévu. Et vu l'heure, j'ai déjà averti que je rentrerais avec les diesels à MONTPARNASSE, ras le bol de tout ce cirque... Comme de bien entendu personne n'a pensé à emporter des postes de radio portatif, il ne nous reste plus que la solution bâtarde d'utiliser les portables, mais il s'agit seulement de refouler d'une centaine de mètres.

Par précaution je demande au poste R si l'on peut se mettre en mouvement, il me réponds qu'il est au courant de la manœuvre et qu'on peut y aller sans problèmes. Nous voilà partis à refouler au portable et le conducteur du secours s'arrête dés qu'il à dégagé le carré. J'avertis le CTT que je reste dans ma cabine et qu'il peut repartir dés que tout est bon. Comme au bout d'un grand moment çà ne bouge toujours pas, je le rappelle, et là, comble du comble il me sort: "Euhh, on à cassé l'aiguille en refoulant" … "Mais çà va s'arranger, on pose un C de calage, on prends un bulletin C et on y va"... Aujourd'hui encore, le C de calage n'a jamais pu être trouvé, et on l'attendrais encore si l'on était resté là bas...



Bon qu'est ce qu'on fait maintenant que l'aiguille est pétée? Oui, quelle est la prochaine? Les ACT ont a nouveau ouvert les portes, la chaleur humide est infernale dans la rame. Et pour une fois les clients ne râlent pas plus que çà, même ceux qui on raté leur avion à ROISSY, ils ont bien senti que les sort s'acharne contre nous et que toute l'équipe du train fait ce qu'elle peut pour se débrouiller dans cette m.erde. Quelques uns sont partis prendre le RER sur le quai un peu plus loin, d'autres viennent discuter avec nous de l'avenir du chemin de fer, et la plupart tentent de prendre le frais par les portes ouvertes. Pendant ce temps là, les Banlieue poursuivent leur ronde et les avions qui décollent nous passe au-dessus "au block" les un des autres.

Finalement, au bout d'un très long moment, la décision venue des autorités compétentes tombe: on va refouler jusqu'à JUVISY, point barre! Qui que quoi comment? Refouler jusqu'où? Sans radio? Le chef prends la décision: on va refouler au portable et si la liaison se coupe dans les tunnels on utilisera la radio sol-train! Allez, faut bien se sortir de là, on va faire comme çà..... On fait remonter tout le monde, les ACT re-bloquent les portes, on essaye la liaison par portable, la liaison radio et nous voilà enfin prêts à partir, il ne nous manque plus que l'accord des ACT, s'agit pas de laisser quelqu'un dans les cailloux.

Le chef de bord fini par m'appeler, mais pas pour m'autoriser à partir, non, pour m'aviser qu'il a dû appeler les secours, un client viens de faire un malaise!!!!!!!!!!! Et oui, çà continue!!!! Donc nous attendons encore presque une heure que les pompiers interviennent (nous sommes plantés sur la voie MG bien en face du BV, mais entre le BV et nous il y a... une belle clôture bien solide...) et finissent par évacuer la personne. Cette fois-ci, c'est la bonne ou pas?



Allez hop on y crois, cette fois ci nous voilà partis a refouler jusqu'à JUVISY, au portable puisqu'il n'y a pas d'autres moyens. Bien sûr le réseau ne passe pas sous les tunnels, il faut en faire un morceau à la radio, je vous dis pas la joie. Finalement, nous arrivons tant bien que mal à JUVISY.

Le régu me demande ce qu'on fait de la rame... je lui réponds que maintenant qu'il y a du jus je vais pouvoir remettre les rames en service et appliquer le GDI. Comme apparemment le panto qui à touché n'engage pas le gabarit, je l'isole, rentre les pages et c'est bon... Ah mais non, il est prévu de transborder tout le monde dans UNE Duplex qui est sur la voie d'à côté. En plus, il faut que je me dépêche: la voie ou l'on est est trop courte, je suis au pieds du carré et les diesels engagent toujours les zones à l'autre bout.

Bon je fais le plus vite possible, surtout qu'entre temps le contre-ordre est arrivé d'en haut: on garde les rames. Sauf que le transbordement avait déjà commencé... la totale! Le dépannage est terminé, le carré s'ouvre pour que je puisse tirer un peu et laisser la place aux diesels qui s'étaient dételés entre temps. Allez, je prends mes affaires et je remonte le quai tout en réfléchissant à la suite. J'en ai ras la casquette mais d'un autre côté il est minuit au milieu de nulle part et je serrais sans doutes plus vite couché, même en montant à LILLE que si je tombe le feu ici.

Finalement mon problème se règle de lui même, puisque entre temps est arrivé un autre CTT qui as tout remis en service. Il me demande si je viens avec lui, je lui réponds que oui; il me demande si je veux travailler, je lui réponds que non. Vu ma chance du jour, c'est peut-être pas le moment de forcer le destin... Nous voilà repartis de JUVISY, je ne sais pas ou je suis et au fond je m'en contrefous. En d'autres temps j'aurais été heureux de faire du tourisme, mais là...



Nous rattrapons VALENTON, le SUD-EST entre la BIF de YERRES et CHEVRY-COSSIGNY, le triangle de COUBERT, PRESLES-EN BRIE et nous voilà relancés sur le barreau d'interconnexion. Pas longtemps, puisque peu après nous trouvons la séquence pour la desserte de "Chez Mickey". On a quand même réussi à faire tout çà sans problèmes...

C'est reparti pour une courte étape vers CDG, nouvelle séquence, nouvel arrêt... et toujours aucun problème! Vous trouvez pas çà louche? Allez c'est re-reparti, nous voilà enfin rendus sur la LGV NORD, le chef est aux manettes, et moi, je commence à m'endormir sérieux... j'ai embauché vers 13h30 et il était minuit à JUVISY, alors... mais j'avais décidé de ne plus regarder la montre, trop déprimant.

En passant BEUGNATRES le CAB commence à clignoter et là le chef me sort froidement: "- Euuuhh, on passe par ARRAS?" "- Ben oui, on passe par ARRAS, c'est écrit sur la fiche train, pourquoi?" "- Euuuhhh c'est à dire, euuuhh je ne connais pas bien la ligne...". Il avait commencé la décélération, je lui dis donc de me laisser la place... "-Euuuuhhh-reusement que j'étais resté..." Les b..s..s comptez vous, on m'a collé un chef qui ne connait pas la ligne!!!! Pour le coup, la rogne me réveille! Ké galère, non mais quelle galère! J'frai pas çà tout les jours, non....

Je sors de la LGV, nous rattrapons la ligne classique à la BIF D'AGNY, le TIV 130 et voilà la gare d'ARRAS. Un petit moment se passe, DING-DING, je commence à rouler, çà freine et "ALARME" se met à clignoter avec la radio qui nous casse les oreilles. ET allez, encore une m.rd., une de plus! L'act de queue a tiré le signal d'alarme parce que le chef de service a donné le départ... alors qu'ils étaient en train de débarquer une personne à mobilité réduite... joli coup! Heureusement, plus de peur que de mal, personne n'est blessé! Encore un arrêt à DOUAI, et nous voici finalement arrivés... vers 3h du mat au lieu de 20heures! Quelle époque épique, comme dit l'autre...

En résumé, je n'ai pas bouffé, il est environ trois heure trente, et je me pointe enfin au foyer. Bien sûr, j'appelle le PC (çà s'appelait encore comme çà...). Je me présente et il me sort qu'il n'a pas encore trop étudié mon cas! "- Bon, te fatigue pas à l'étudier, au vu des circonstances ce sera le premier train en voiture BORDEAUX, çà doit être vers midi, et surtout si vous avez besoin de moi, faites comme si j'étais pas là!" "- Oui, bon d'accord, il va falloir que je trouve quelqu'un pour ton train, à 6 heure..." "- Et oui il va falloir, mais bon c'est pas tout çà, je vais me coucher. Au revoir et à la prochaine!" Si j'ai bien compris, il aurait supporté que je reparte dans l'autre sens à 6 h, avec à peu prés 2 heures de repos, il y a des rêveurs... mais j'ai surement mal compris.


FIN

Pour conclure cette tumultueuse aventure à multiples rebondissements, la Direction de la Traction de l'époque à clairement fait savoir quelle se lavait les mains de cette affaire, et j'ai rédigé mon rapport avec l'aide très précieuse de mon Chef d'Unité de Production de l'époque. D'ailleurs, ce rapport, je l'ai toujours, hé, hé...

Modifié par JLChauvin
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j' aime bien revoir ce sujet..merci..

le fin est.......quant on voit les réactions du pc alors qu'il est "informé" depuis plusieurs heures qu'un train est découvert le matin et qu'il ne réagit pas ainsi que les autres intervenants traction (en 99 pas encore de filière GM) ,.....c'est pire que désolant..

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Aujourd'hui, cette même tranche de vie se terminerais par l'impossibilité de dormir au foyer puisqu'Orféa aurait refourgué la chambre et avisé l'UP d'un "no-show"....

et oui , il n'existe plus aucun lien entre les différents intervenants

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A la demande quasi-générale de deux éminents membres du forum ( :Smiley_04: ) je remets mon histoire de train maudit, en espérant échapper cette fois-ci à toute provocation polémiste. Sinon le résultat sera le même que la première fois, et à titre définitif sur ce forum. :biggrin:

(...)

Très bon dans ton récit, par moments on s'imagine bien dans ce train ...

Modifié par assouan
la citation complète de l'article ne facilite pas la lecture de ton commentaire
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On a tous connu des "galères" mais la tienne tient le haut du pavé.....certains s'imaginent que nous sommes que des "pousse manettes", ton récit prouve au moins une chose, il éxiste encore une consciense professionnelle et notre métier nécessite une bonne dose d'abnégation dans ses situations critiques; je pensse que après cette "tournée" tu as du être "blindé" jusqu'à la fin de ta carrière...

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Invité JLChauvin

On a tous connu des "galères" mais la tienne tient le haut du pavé.....certains s'imaginent que nous sommes que des "pousse manettes", ton récit prouve au moins une chose, il éxiste encore une consciense professionnelle et notre métier nécessite une bonne dose d'abnégation dans ses situations critiques; je pensse que après cette "tournée" tu as du être "blindé" jusqu'à la fin de ta carrière...

Oh, j'avais déjà commencé à me blinder bien avant.

Notamment une histoire de commande de secours avec une 9300 du côté de Toulouse qui m'a couté mon seul et unique BAI (Blâme Avec Inscription au dossier), mais cette histoire là a chauffé aux oreilles de bien d'autres qui s'étaient crus à l'abri derrière leur autoritarisme ridicule... parce que si un tas de chefaillons avaient vraiment fait leur travail il n'y avait même pas le début de la moindre conséquence. C'est aussi a cette occasion que j'ai pu constater la combativité de certains dirigeants syndicaux "fédéraux" dont l'un se planquait courageusement dans les couloirs de la machine pendant que je m'entreprenais le chef adjoint du PC (Poste de commandement) de Toulouse sur le quai de Matabiau. Faut croire que je n'avais pas encore bien compris qui était qui, à l'époque.

Ceci-dit, comme ex attaché 5, ex-futur chef, balancé très tôt à débouler à 160 au petit matin avec le soleil dans la poire dans la banlieue d'Austerlitz en venant de Bordeaux, il a bien fallu que je me blinde de bonne heure. Et en plus j'aimais çà! :Smiley_04:

Et puis j'ai fini chat noir, alors les incidents et l'application du règlement c'était devenu la routine....

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c'est l'avantage notoire, effectivement, du chat noir.....la tête dans les bouquins, histoire de ne pas être trop à la ramasse..

Fabrice

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à 160 au petit matin avec le soleil dans la poire dans la banlieue d'Austerlitz en venant de Bordeaux,

De quoi, de quoi? Tu as fait tes exercices mémoire, aujourd'hui, mon petit Jean-Louis? Hi HI

Par contre, le soleil d'Austerlitz, c'est vrai que ça a coûté à certains. (2 décembre 1805, hop! Exercice réussi)

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Bonjour,

Très intéressant témoignage pour tout le monde, puisque n'étant pas tractionnaire, ce récit m'a passionné. On sent toute la tension qu'il y a, les procédures qui s'enchaînent, la fatigue qui s'accumule, et les emmerdes aussi malheureusement.

Ordres et contre-ordres, comme toujours. C'est souvent pareil entre gares et PC. Ils ont une vision assez lointaine du terrain, et les décisions prises ne sont pas toujours très pertinentes d'un point de vue circulation. Après, les gares se retrouvent coincées par les installations de sécurité ou la longueur des voies.

Cette histoire de JLChauvin m'en rappelle une lorsque j'étais agent-circulation à Uzerche. Surtout par le fait que le lendemain, un article dans un canard local rapportait les faits comptés par un voyageur qui n'avait rien compris. Pour lui, les procédures de sécurité avaient bon dos pour justifier le retard.

L'histoire: le train, je crois que c'était le 3681, et je ne sais même plus jusqu'où il descendait, Toulouse peut-être. Il avait pris deux heures de retard, pour des incidents depuis Paris, mais là j'ai oublié aussi. A Uzerche, surveillance au passage, RAS. Peu après, appel à la radio, il a heurté un sanglier moins d'un kilomètre en aval, la CG est cassée ! Demande de secours, décision assez rapide de faire monter une machine électrique de Brive pour assurer le secours pas l'arrière, avec retour à Uzerche.

Tout cela se met en place, j'avise mon astreinte, parce que je suis de nuit et tout seul. Mon dirigeant, un ancien, qui a été plus longtemps agent que chef et qui n'a jamais eu "le melon", arrive en deux temps trois mouvements. L'astreinte arrive aussi. Je garde mon poste, eux s'occupent de tout sur le terrain (manœuvres, voyageurs). On fait monter les machines de Brive, mais "ça descend" du nord, donc il faut laisser passer en utilisant les IPCS.

La machine de secours arrive, il fait noir, on repasse sur la bonne voie, les bulletins utiles, et départ. Tout est prêt pour le retour, et sur place les deux tractionnaires ont très bien fait leur boulot, ça ne traîne pas. Il faudra ensuite faire l'impasse de la machine de secours, différer celle avariée, et faire les freins.

La manœuvre est simple, mais bon, quand il fait nuit et qu'on ne connaît pas bien la gare sous cet aspect, on prend ses précautions, ce qui fût fait.

Pendant ce temps ça roule sur la voie contigüe, quelques trains "descendent" encore sur Brive. Je suis pris par tout un tas d'enclenchements qui allongent la durée des manœuvres, surtout qu'il faut gérer les entrées et sorties des IPCS des trains qui circulent.

Finalement, au bout de deux heures, tout est prêt, ça repart, sans incident supplémentaire, tout s'est bien passé, que ce soit du côté traction ou du côté exploitation. L'ACT a bien informé les voyageurs, tous ont salué son professionnalisme.

Il n'y a qu'un abruti qui s'est permis d'intervenir dans le torchon local pour faire remarquer qu'il y avait eu deux heures d'intervention "qu'on avait dit" qu'il y avait eu heurt avec un sanglier, et que la sécurité avait bon dos. Dans la nuit, les collègues de la voie sont allés chercher le sanglier en draisine, belle bête...

Autrement dit, le commentaire du mécontent était loin d'être fondé, car tout s'était passé en toute sécurité, et d'un point de vue traction, je pense que les nerfs devaient être à vif après cet incident, sachant qu'il y en avait eu d'autres avant sur le parcours. En plus la manœuvre de nuit en rajoutait.

Le récit de JLChauvin, c'est vraiment l'incroyable accumulation de malchances.

  • J'adore 4
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Une anecdote d'un "cul de plomb"

A la fin des années 70, de service de soirée à la permanence centrale du réseau nord (ne cherchez pas, ça n'existe plus), je suis informé par le poste de commandement de Lille que des dockers en colère ont bloqué la passerelle d'embarquement du ferry boat à Dunkerque.

Nous décidons donc de détourner le train "Night Ferry" sur Calais Maritime. Solution permettant de maintenir la relation Paris - Londres dans des horaires proches mais imposant le transbordement des voyageurs utilisant les voitures lits.

Peu de temps après j'apprends que, par suite d'un mouvement de solidarité des dockers de Calais, la gare de Calais Maritime elle aussi est bloquée.

Informé de la situation le cadre supérieur d'astreinte exige le maintien d'une circulation entre Paris et Lille et me laisse le soin de traiter le cas des voyageurs pour la Grande Bretagne.

Il reste donc le repli sur Boulogne Maritime. Cela implique toutefois de faire intervenir les services de l'Armement Naval car il s'agit d'utiliser un bateau britannique qui passe normalement la nuit à quai.

Cela implique également de faire circuler deux trains, l'un de Paris à Lille pour les voyageurs "locaux", l'autre de Paris à Boulogne pour ceux à destination de la Grande Bretagne.

Sans plus attendre le chantier du Landy est contacté pour former les deux trains, les PC de Paris Nord et d'Amiens se chargeant de la fourniture des engins de traction et du personnel ainsi que du tracé de la marche du second train.

Un long moment plus tard le service de l'Armement Naval m'informe que le transit par Boulogne ne sera pas possible, l'équipage du bateau britannique ne voulant pas s'immiscer dans un conflit franco-français.

Il ne reste plus que la solution d'un passage par Dieppe Maritime...

Je contacte mon homologue du réseau Ouest qui, compte tenu de l'urgence - l'heure a tourné! - me suggère de traiter directement avec cette gare. Je joins le chef de service de Dieppe qui m'assure qu'il conserve le personnel nécessaire et attend confirmation de ce détournement.

Les PC de Paris Nord, Paris St Lazare et Rouen prennent en charge, chacun pour ce qui le concerne, le tracé d'un train spécial Paris Nord - Dieppe Maritime via Pontoise (où il rebrousse) et Rouen, la fourniture du personnel et celui des engins de traction (électrique jusqu'à Rouen, Diesel au delà).

En même temps et d'entente avec le PC de Lille et la Permanence Centrale de la SNCB à Bruxelles j'essaie de régler le cas des voyageurs en provenance de l'est de la France (des voitures en provenance de Turin et de Bâle à destination de Dunkerque sont normalement incorporées au Night Ferry lors de son rebroussement en gare de Lille).

D'un commun accord nous décidons de reporter les voyageurs dans le train de nuit Paris - Amsterdam sur le trajet Aulnoye - Bruxelles d'où ils seront acheminés vers Ostende par un train du service intérieur belge.

Le PC de Metz est chargé d'informer le personnel d'accompagnement du train Bâle - Lille pour qu'il prévienne les voyageurs concernés et évite qu'ils n'aillent jusqu'à Lille sans possibilité de poursuivre leur voyage.

Le train Bâle - Lille ne desservant pas Aulnoye le PC de Lille préfère mettre en marche un autorail de raccord entre Anor et Aulnoye pour éviter le rebroussement à Aulnoye et donc l'inversion de la composition du train, chose toujours ennuyeuse pour un train à tranches multiples.

A 22 heures précises, heure normale de départ du Night Ferry, deux trains partent de la gare de Paris Nord de part et d'autre du même quai, l'un pour Lille, l'autre pour Dieppe.

Il ne me reste plus qu'à rédiger un rapport circonstancié...

Le lendemain à ma prise de service et comme de coutume je fais le tour des PC.

La conversation revient naturellement sur les péripéties de la veille. Grâce à l'implication de tous tout c'est bien passé et aucun voyageur n'est resté en rade.

Aucun?

Pas tout à fait car la veille vers 23h40 l'agent de manœuvre de la gare de Lille s'est demandé ce qu'il allait faire de la voiture lits Bruxelles - Londres parvenue par le dernier train Bruxelles - Lille et normalement ajoutée au Night Ferry puisque cette fois là le train n'allait pas plus loin.

Cette voiture a donc été acheminée de Lille à Aulnoye pour être incorporée en queue du train de nuit Paris - Amsterdam.

Les voyageurs, au nombre de 7, auront donc roulé toute la nuit pour se retrouver à leur point de départ...

Modifié par Inharime
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Invité jackv

A la fin des années 70, de service de soirée à la permanence centrale du réseau nord (ne cherchez pas, ça n'existe plus),

je t'ai peut être eu au telephone

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Ce ne serait plus possible aujourd'hui puisque le "Night Ferry" et les 4 gares maritimes citées n'existent plus :Smiley_19:.

C'était aussi l'époque ou l'on disposait de personnel et de matériel de réserve facilement et rapidement opérationnel.

La gestion par activités et la chasse aux coûts jugés excessifs sont passés par là. :sad:

Enfin c'était une époque où "on" s'efforçait d'apporter une solution ferroviaire en cas de problème. controleursncf

Cela dit je ne suis pas sûr que les voyageurs en provenance de l'est de la France qui ont dû se "manger" des transbordements successifs à Anor, Aulnoye et Bruxelles en pleine nuit ou au petit matin ont vraiment apprécié... :Smiley_41:

Mais ceux qui ont fait le trajet de Bruxelles à Bruxelles via Lille et Aulnoye ne se sont pas vus réclamer de supplément...

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et oui de nigt ferry ...des grandes aventures et des retards en conséquence....car bien sur la manche et ses tempêtes se foutent bien des horaires SNCF et 12 heures de retard n'avait parfois rien d'anormal..

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